lundi 15 juillet 2019

L'EPAF tend les cordes !


Alpes du nord du 28 juin au 4 juillet 2019


Jour 1 : Mise en jambe à 2750 m avec la pointe Perçée 



Cap sur les Aravis, après un bon jeu de piste (de ski) pour certaines voitures qui sont allé visiter involontairement une station de nuit. Nous campons à même le parking du col des Annes à 1700m, avec les troupeaux d’Abondances . Envie de lait chaud issue de la traite au petit matin avant l’approche sur le névé pour rejoindre le pied des voies. Manu, Nadia et Aurélie se lancent dans « ça rigole des les cannelures » (8 longueurs, TD), ambiance fraîche et esthétique, pendant que le reste de l’équipe monte au sommet par l’arrête du doigt (11 longueurs, D)

La Roche Percée se découvre au détour d’un premier fil d’arrête, puis en suivant un second rasoir, la vue s’ouvre sur le gigantesque massif du Mont Blanc. L’équipe entière se retrouve sur la vire de sortie avant de se redéployer soit vers une ouverture de voie en face ouest dans un terrain un peu délité, soit vers la sortie classique en 5. Pour celles qui n’était pas trop familières avec l’artif, ce fut une bonne bataille. Virginie marque notre respect en ayant tout fait «en grosses».
Près du sommet, une partie de l’équipe doit s’arrêter car le second d’une cordée voisine vient de chuter. Nadia, toujours opérationnelle et rassurante, aide à la manip . L’hélico arrive pendant que nous cogitons sur l’état rappé de la corde après le pendule, car certains points n’avait pas été clipés dans cette longueur facile. Redescente via le chapelet rouge de la voie normale. Fin de journée vers 22h avec accueil chaleureux chez le guide et instructeur Bruno à Passy, qui sait exactement ce dont les grimpeurs rêvent après une bonne journée (à savoir combo : douche-riz- salade-coin de jardin pour dormir). Merci infiniment.


Jour 2 : montée éprouvante au refuge des Conscrits

Il aura fallu le mériter ce beau refuge moderne et lumineux ! Nous empruntons le chemin de la passerelle et testons la résistance de l’équipe sur 1500 m de dénivelé en plein cagnard. Nous avons a bien entendu moins souffert que ceux qui étaient appelés à la guerre, les conscrits, qui ont inspiré le nom du refuge situé à 2614m. Sitôt arrivées, Lara nous coache pour une école de neige derrière le bâtiment. Nous enfilons Goretex et baudriers pour pouvoir bien glisser (et s’arrêter) sur les pentes de neige et revoir anneaux de buste et encordements, juste avant le repas du soir. De larges baies vitrées permettent de repérer le glacier du lendemain et d’observer les bouquetins.

Jour 3 : la crevasse vorace

C’est en direction du col des Dômes de Miage que l’équipe fait son baptême de glace sur Tré-la -Tête. Nous choisissons l’ascension du premier dôme à 3670m, permettant de prendre de plein fouet la beauté italienne du Mont blanc. On devine une cordée qui continue dans le prolongement vers l’Aiguille de Bionassay nous donnant envie de futures envolées.


Au retour, nous préparons un exercice de remontée de crevasse. Coralie est volontaire, se laisse glisser dans la face immergée bleutée du glacier. Nadia et Audrey tirent et la remontent sur quelques mètres, puis, plus rien ne bouge. Pris d’un entrain nous tirons à plusieurs, avec une belle coordination, mais contre-productive puisque nous creusons d’avantage la lèvre de la crevasse dans une neige humide et molle !« Tirez pas ! » nous crie la crevasse ! Lara passe très vite à la réalisation de corps morts, et Coralie arrive à dégager la corde et à finir sa remontée. Nous terminons par la réalisation des mouflages et retenons l’importance d’avoir une réserve de corde et un noeud de chaise au pontet. Nadia témoigne de la force du choc sur le baudrier de celle qui assure lors de la chute, même avec une corde tendue. Au retour, les cordes se tendent entre chacune de nos neuf silhouettes. Arrivées au refuge, il y en aura pour tout les goûts : sieste-mouflage de terrasse- gâteau au chocolat. Gigi (Virginie) nous offre un cours de carto et prépare avec Audrey l’avancement de la sortie de demain. Nous poursuivons par un réunion le soir pour refixer les objectifs de l’an prochain et faire le bilan des 6 mois écoulés. Puis, un orage carabiné avec des vents violents nous fera ensuite sortir du lit pour aller ranger les piolets et casques restés dehors. Même dans un refuge, la force des éléments à de quoi impressionner.

Jour 4 : Hold up sur la météo et voyage sur le glacier.

Nous sommes désormais opérationnelles en trois quart d’heure à partir du lever. La redescente de nuit sur le glacier est rythmée par les cascades et mares créés par l’orage de la veille. Au pied des Lanchettes, notre équipe rentre en conciliabule (ou plutôt effectue un «3 par 3» : inspections des facteurs « environnement » « humains » et « techniques » , avant et pendant la course). Nous sommes contentes de pouvoir faire un tour de parole et l’option «On y va en mode « light »» est retenue. Notre objectif est de repasser sous les barres rocheuses qui peuvent dégueuler du caillou avant 10h.

Le timing est maintenu, chacune s’entraînant à assurer sa compagne de cordée à 1m. Une synchronisation parfaite est nécessaire : « ton pied mon pied » est le dicton adéquat. Nous foulons le Pain de sucre du Mont Tondu (3169m) et ses belles roches mouchetées à 8h30 avec un panorama sur tout le glacier. 

La descente se déroule rapidement sauf au ressaut glaciaire qui dévoile une carapace de roche noires usées. Des blocs charriés par le glacier composent un paysage lunaire. Lara va en éclaireuse et choisit un passage fin à travers les barres rocheuses. Il s’avère sans doute beaucoup plus facile que la rive droite sur pente de glace à 40° farcie de cailloux en équilibre instable. La descente nous révèle un paysage « de l’espace », pour reprendre l’expression familière, avec ses cratères de glace et le chaos des roches métamorphiques : cordiérites, gneiss et autres migmatites. Car oui, nous avons la chance d’avoir une géologue Audrey qui nous donne quelques clés pour élargir notre dialogue avec la montagne! Sous nos petits crampons, nous sentons l’érosion en action.


Jour 5 : un panorama qui en vaut la benne !

On apprécie les bennes de Chamonix après avoir crapahuté 4 jours. Découverte du panorama gigantesque et de l’ambiance chamoniarde. Nous prenons conscience de la chance d’avoir pu, grace au choix des itinéraires des jours précédents, avoir la montagne quasiment pour nous seules. Notre mission de la journée: immortaliser devant le Mont Blanc les doudounes Pyrenex gentilment envoyées par le sponsor . 


Une fois la pose médiatique effectuée, nous révisons nos classiques : « Frison roche » une grande voie en 6 longueurs sous le Brevent pour Maëlle, Manue, Coralie, et l’arrête « Mic et Mouse » pour Virginie, Audrey, Aurélie et Anais. Choisir cet itinéraire facile nous permet d’optimiser chaque manip’ sous les yeux attentifs et les encouragements de Nadia et Lara. On s’adapte, on ajuste, on apprend des astuces pour anticiper et gagner du temps. L’heure du départ à bientôt sonné, mais nous resterons encore quelques jours ensemble par la pensée.

Cinq jour ou nous avons pu sentir qu’en cas de moment difficile, chacune serait épaulée par la force du groupe. Cinq jour d’ajustement mutuel pour que chacune trouve sa place afin de faire avancer l’équipe vers de prochaines aventures. Cinq jours d’apprentissage intense qui vont infuser et s’engrammer cet été.